samedi 13 février 2016

RUE MUSTEL - Le Journal d'un Technicien de la DSEM - NUMERO 1 :

« Peu importe ce que vous faites, du moment que c'est facturé à quelqu'un ! »

« L’intégralité de ce qui se produit dans l’univers peut se réduire à un nombre déterminé de cellules Excell qui, en se combinant au moyen d’opérateurs relationnels fluctuants, engendrent un ensemble de conclusions à la variabilité prédéfinie dont la valeur justificative et qualitative est résolument indépendante des calculs qui ont servi à les établir. »
Traduction : Même si tu fais tout ce qu’on te dit de la manière dont on te le dis, si on a décidé au-dessus de toi que c'est mal fait, ce sera mal fait. »
(Le Traité d'Excellotronique du Docteur Méphistos)


Éditorial.
Après treize mois d'absence, j'ai retrouvé ma place au sein de cette grande famille qu'est la Poste et plus précisément à l'Agence Territoriale de Maintenance de Seine Maritime où je suis technicien. Comme de nombreuses autres entreprises, la Poste est en pleine mutation. Les métiers, filières, directions et autres structures qui la composent sont donc dans un état d'ébullition permanente. La direction technique à laquelle j'appartiens n'échappe pas à cette grande cuisine qui n'est pas sans rappeler ces émissions de la télévision où les candidats de deux équipes en compétition courent dans tous les sens en poussant des cris de bêtes blessées dans le but de faire un gâteau original composé d'ingrédients qui n'ont aucuns rapports avec la pâtisserie, la cuisine ou la gastronomie. Si on part du principe que les règles du jeu changent tous les quatre matins et qu'elles sont établies par des gens qui pensent que le terrain n'est qu'un concept, ce n'est pas demain qu'on le mangera, ce gâteau.
« Une restructuration, c'est comme le jour des soldes mais sur plusieurs années. »


Des projets, toujours des projets.
La Direction du Support Et de la Maintenance (la DSEM, pour les initiés) est une des deux directions techniques de la Poste (l'autre étant celle de la branche Courrier). Elle est à la pointe de l'innovation dans le domaine de la restructuration vite expédiée. En effet, depuis 1999, date de sa création, elle accumule les projets de modification qu'elle ne mène jamais à son terme. Le projet Odyssée avait tout d'abord divisé la direction technique en Agences Régionales de Maintenance, elles-mêmes composées d'agences départementales (les ATM) ; le projet suivant supprima les ARM et regroupa les ATM par deux ou trois en Territoires sous la houlette d'un directeur (le DTSI).
Les sommités hiérarchiques à la tête de la DSEM ont usé de tous les subterfuges à leur disposition pour convaincre les techniciens que tout était réglé alors que rien ne l'était. Les ARM n'ont pas disparu : elles sont désormais des coquilles vides. Les Territoires n'ont pour seul personnel que le Directeur qui le gère. Les techniciens ont toujours leur ATM d'origine comme résidence administrative. La conclusion est pour le moins burlesque : les Directeur du Territoire et les agents qu'il est supposé chapeauter sont dans deux structures différentes. Mais parfois, ils réussissent à se parler.
Les problèmes soulevés par le projet des territoires n'ont pas été réglés. La hiérarchie a fait la sourde oreille et n'a pas hésité à mentir pour faire taire les récalcitrants. La vérité vient d'en-haut, c'est bien connu. En bas, on ne saurait avoir raison, nos grades inférieurs ne nous permettent pas d'avoir une opinion ou un avis. Pour nous clouer le bec, nos hiérarques ont pondu un nouveau projet qui met fin au précédent mais en conservant ses incohérences.
Après avoir découpé la France en super régions et les avoir démembrées pour faire les territoires, on redécoupe tout pour former des secteurs. Il faut simplifier, mais à la française : en n'arrangeant personne. On commence par supprimer les petites agences et les antennes annexes, on regroupe les techniciens à un même endroit et on prétend que ce sera plus pratique et économique. Mais qu'on se rassure, le rayon d'action des techniciens ne va pas augmenter grâce à un procédé magique : les zones les plus reculées et les moins accessibles seront confiées aux secteurs voisins qui feront pareillement avec les leurs. Ces messieurs du siège espèrent nous faire gober ça !


Retour sur 2015.
L'année avait commencé avec le drame de Charlie Hebdo, elle s'est terminée dans le sang avec la fusillade du Bataclan. Ces deux événements occupèrent une large place dans l'actualité, on comprend bien pourquoi. Sur le plan politique, les discussions ont tourné autour de l'état d'urgence, de sa reconduction, de son inscription dans la Constitution, enfin de la déchéance de la nationalité. Les débats continuent. La question de la déchéance ne sera pas tranchée de sitôt étant donné que les partisans ou les adversaires ont chacun des arguments valables.
Que s'est-il passé à l'ATM durant mon absence ? Probablement rien, à part une délocalisation de l'agence, non pas en Chine ou dans quelques endroits exotiques de l'Europe de l'Est mais quelques rues plus loin dans des locaux plus solides, plus propres et plus modernes. D'autres choses ont changé mais elles ne doivent pas être importantes puisque c'est une étudiante en formation par alternance qui me les a indiquées. Après treize mois d'absence, j'aurais cru que les cadres m'en auraient parlé eux-mêmes, ils n'en ont rien fait. J'ai toujours cette fâcheuse manie d'avoir des illusions.


2016, une nouvelle année commence.
Pour moi, cette année a commencé le premier février. Le mois de janvier ne s'est pas évaporé dans un changement de calendrier : il a été bien rempli mais pas au travail. Mes collègues en activité durant cette période ont été confrontés aux prémices du projet de restructuration évoqué plus haut. Les négociations avec les syndicats continuent. Le texte définitif n'est donc pas encore signé. Pourtant, et la chose est on ne peut plus cocasse, un calendrier pour son application a déjà été diffusé comme si tout était acté. Mais, contrairement aux précédents remaniements, le siège a sorti le grand jeu en privilégiant le côté participatif. Voilà ce qu'il faut comprendre : « On sait que vous ne voulez pas de ce projet mais nous sommes prêt à entendre toutes vos idées pour que vous l'appliquiez quand même tel que nous le souhaitons. On appellera ça le projet d'établissement ! »


« Le changement, c'est maintenant ; après, c'est trop tard ! »
Le changement est devenu une véritable manie. Il se fait attendre en politique bien que tous les candidats, à toutes les élections et tous partis confondus, le promettent mais il ne vient jamais. Dans les entreprises, il est omniprésent mais sous des formes rarement bénéfiques. On le désigne par le terme de restructuration. « Une restructuration est une opération par laquelle un ensemble organisé voit sa structure organisationnelle remaniée en vue d’atteindre une nouvelle configuration. »
J'ai lu sur un site juridique que « un plan de restructuration est rendu nécessaire lorsque la santé financière d'une entreprise l'oblige à faire des sacrifices. » En règle générale, les conséquences de ces opérations ne touchent jamais ceux qui les mettent en marche et les sacrifices se font sur le dos des employés par des licenciements, des baisses de salaire, une augmentation du temps de travail. L'élaboration de ces plans de restructuration se fait toujours en haut lieu, ce qui est stupide. Les dirigeants devraient dire à leurs employés les but qu'ils souhaitent atteindre, dans l'intérêt de tous, bien entendu, et ce sont ces mêmes employés qui élaboreraient les modalités du changement. En effet, qui d'autre qu'eux connaissent le travail et comment il convient de le faire ? On appelle ça la démocratie, un concept trop généralement ignoré.


De quoi sont composées les restructurations ?
La direction de la DSEM a pris le parti de ne pas affoler les techniciens en dissimulant ses restructurations successives sous des noms qui sont prévus pour rassurer mais qui, en fait, soulèvent des torrents d'épouvante. Un groupe de lettres peut parfois faire l'affaire : le précédent projet s'appelait PPO (pour Projet Performance Opérationnelle). L'adjonction d'un terme rassurant est de temps en temps utilisé : au courrier, le projet Facteur d'Avenir est l'exemple type de l'hypocrisie des cadres dirigeants. Ce sont, il est vrai, de grands comiques.
Un projet de restructuration est un recentrage général. En effet, tout passe à la casserole : le périmètre d'intervention des techniciens est la première chose qui est pointée du doigt. Il est départemental puis régional, il peut être également les deux à la fois ou ni l'un ni l'autre. Désormais, après avoir été territorial, il est question de secteurs et de périmètres dits isochrones. Explication : vous prenez la ville du point d'attache des techniciens et, avec un compas virtuel, vous tracez un cercle correspondant à une heure de trajet. Tout ce qui est au delà de ce cercle est appelé « zone d'ombre ». Personne ne sait qui y intervient : cela peut être le secteur le plus proche, le voisin, les deux ou aucun.
La façon de manager tout ce beau monde change également de façon drastique car, c'est bien connu, toute la maintenance tourne autour des cadres, les éléments clé de l'efficacité, et des outils informatiques qui vomissent des chiffres à ne plus savoir qu'en faire. Les techniciens ne sont que des pions râleurs et des éléments perturbateurs : il faut toujours qu'ils ouvrent leur grande gueule au lieu de la fermer et d'obéir.


Pourquoi restructurer ?
Procéder à des changements dans l'organisation de l'entreprise n'est pas forcément une calamité. Mieux, cela peut améliorer les choses, du moins, en théorie. Or, nous sommes en France, le pays qui a fait la révolution en 1789 mais qui est resté féodal. C'est le sommet qui sait tout mieux que tout le monde et c'est lui, et lui seul qui impose les modèles d'organisation qu'il est allé cherché chez le voisin, de préférence s'ils ont foiré. La base, elle, se tait et obéit.
Des conditions économiques nouvelles, une évolution du secteur d'activité, un recentrage sur le cœur de métier, une configuration géographique qui a été modifiée ou des failles dans l'organisation existante peuvent amener la direction à réorganiser l'entreprise. Elle met alors en place une nouvelle stratégie qui s'adapte au mieux avec ses besoins. Tout le monde est d'accord sur le principe. Mystérieusement, pour prendre l'exemple de la DSEM, la nouvelle politique n'arrange rien à la situation : elle en accentue les défauts qu'elle prétend vouloir corriger.
Le territoire de Haute-Normandie rassemble le personnel des agences de Rouen, d’Évreux et du Havre. Chacune est dirigée différemment selon des règles qui varient selon les personnes et les circonstances. On voudrait nous faire admettre qu'en ajoutant les deux départements voisins, les choses vont s'arranger. Le technicien croit au miracle : c'est pour cela qu'il est syndiqué.


« 1789 : les bourgeois prennent le pouvoir. 1989 : ils sont toujours là ! » avait déclaré Pierre Desproges, et il avait raison. Les français sont descendus dans la rue pour faire la révolution et s'affranchir des modèles sociétaux ancestraux avec une régularité d'horloge. Ils ont commencé en 1789, en frappant fort, trop peut-être. Ils ont recommencé en 1830 pour chasser les Bourbons, définitivement, cette fois (parce qu'ils étaient revenus, imposés par l'Europe, déjà elle, et le congrès de Vienne). Les bourgeois en ont profité pour imposer la monarchie de juillet et placer sur le trône un rejeton d'une branche cadette : Louis-Philippe. En 1848, la république chassa le roi citoyen et le suffrage universel plaça aux commandes un prince-président qui rétablit l'Empire quatre ans plus tard. Cet empire sombra avec la guerre de 1870 et la perte de l'Alsace et de la Lorraine. La Troisième République occupa la moitié du vingtième siècle pour s'effondrer entre les mains du Maréchal Pétain. Le Général de Gaulle instaura la république que nous connaissons aujourd'hui, une monarchie républicaine, élective et quinquennale, qui confère au Président bien plus de pouvoirs que n'en avait Louis XIV, pourtant considéré comme le modèle de monarque absolu. Dans cette histoire, le peuple (c'est à dire l'universalité des citoyens et non pas simplement les plus humbles) n'est pas parvenu à s'affranchir de la structure pyramidale de la société. Il a tenté de renverser la vapeur en 1936, obtint quelques succès avec le front populaire de Léon Blum (qui fut déporté par les allemands, ne l'oublions pas). Plus tard, en 1968, les fameux événements eurent certes des répercussions, mais pas celles qu'on espérait. La majorité s'est toujours fait berner par une minorité vicieuse et élitiste.


« La hiérarchie a été inventée par des incompétents pour contraindre ceux qui avaient le savoir-faire à leur obéir. »
Dans nos sociétés dites modernes, toutes les décisions viennent d'en-haut. Dans une république, c'est le gouvernement qui décide, les électeurs se contentent ensuite d'obéir. Parfois, ils protestent : ils font grève, quand ils ont un travail, ils bloquent des routes et déversent du fumier devant les préfectures. Et comme on ne les écoute pas, au mieux, ils ne vont plus voter, au pire, ils votent Marine Le Pen. Dans le domaine religieux, l'imagination est plus riche, plus originale, insurpassable. Les décisions viennent d'en-haut, très haut, on ne peut pas plus haut : c'est Dieu Lui-même qui dicte ses directives. On voit d'ailleurs où ça nous mène.
D'où vient cette manie d'attendre sans cesse la révélation des hautes sphères, quelles qu'elles soient, alors qu'il suffit de regarder autour de soi pour se mettre d'accord et aller dans un même sens. La logique voudrait que les règlements soient élaborés par ceux qui les appliqueront et qu'ils soient mis en forme par un groupe de personnes issues de cette base pour leur assurer une cohérence. Personne ne leur interdirait de les appliquer sur un territoire plus large si la nécessité l'exige. Au lieu de cela, tout se passe à l'envers.


« Le véritable danger pour le militaire, ce n'est pas l'ennemi, mais la hiérarchie. »
Une hiérarchie est constituée de pions qui s'agencent par strates successives comme en géologie. Les plus anciens, qui sont les plus nombreux, sont tout en dessous. Ils forment une couche primaire que des grades d'opérette attribués arbitrairement par des chefaillons de Prisunic rendent instable voire incontrôlables. Juste au-dessus s'entassent quelques minces couches dont les contours restent flous. Là commence le règne des cadres et des encadrants. Les pions qui évoluent dans cet univers se croient investis d'une mission quasi divine puisqu'ils ont l'illusion d'exercer un pouvoir sur leurs semblables. Ils se trompent lourdement mais ne leur dites pas, ils ne vous croiraient pas. Leur naïveté serait touchante si elle n'était pas franchement ridicule.
Les couches supérieures deviennent de plus en plus minces et les managers qui y grouillent ont largement dépassé le stade de la naïveté. Ils vivent en plein fantasme. Ils ne sont pas différents de ceux qu'ils supervisent : ils se font tout autant manipuler. Ils s'imaginent donneurs d'ordre, ils ne sont que des passe-plats. Tout directeur de ci ou de ça qu'ils soient, ils ont tout de même quelqu'un au-dessus d'eux qui leur dit ce qu'ils ont à faire. Évidemment, le salaire n'est pas le même, le prestige d'un titre quasi nobiliaire non plus.


« Il faut savoir descendre les échelons de la hiérarchie au lieu de monter sur la tête des autres : on peut tirer un âne avec une ficelle, mais non le pousser. »
Il faut imaginer une restructuration dans une entreprise comme une partie de cartes réunissant des précieux ridicules dans le salon cossu d'un club pour gens fortunés. A la table de jeu, l'un jouerait au rami, tandis que les autres suivraient les règles du bridge, du tarot, du poker, de la belote, de la manille ou de la bataille. Les cartes seraient issues d'un jeu des sept familles qui seraient les suivantes : rentabilité, performance, économie, efficacité, polyvalence, optimisation et satisfaction client. Le joueur qui parviendrait à rassembler devant lui toutes les familles avec le moins de cartes serait déclaré vainqueur.
Dans la réalité, les choses sont bien pires : le siège n'entend, ne comprend, n'analyse et ne tient compte que des chiffres, des données issues de moulinettes informatiques qui ne correspondent en rien à ce qui se passe vraiment sur le terrain. Les efforts surhumains, une imagination débordante et une volonté inébranlable des cadres de faire rentrer des résultats coûte que coûte dans le moule pour ne pas attirer l'attention ou mettre en péril le montant de leur part variable participe largement à cette mascarade. Non, la carte ne fait pas le territoire et le grade ne confère pas les compétences comme par magie. On ne consulte pas les techniciens qui sont sur le terrain comme on va chez la cartomancienne en lui faisant dire ce qu'on veut entendre. Un directeur délégué de la DSEM a dit un jour qu'il n'y avait pas de démocratie en entre-prise. S'il y en avait ne serait-ce qu'un peu, les choses iraient certainement bien mieux.


« En 1981, nous avons établi le socle du changement. En 2012, on attend toujours le sculpteur qui devait faire le reste. »
La DSEM fait preuve d’une imagination débordante pour rendre les techniciens polyvalents ou, dit autrement, multi-compétents. Pour cela, elle a développé un concept original : n'importe qui devra pouvoir faire n'importe quoi, n'importe où, n'importe comment, le moins longtemps possible pour en faire le plus possible. Les arguments invoqués par la direction sont d'ordre économique. Tout le monde est capable de comprendre et d'admettre que les budgets se resserrent et que le temps de l'opulence est révolu, même si c'est, une fois de plus, un mensonge éhonté. Les patrons ne conçoivent les économies que comme une réduction de la masse salariale. Donnons-leur rai-son, pour une fois. Supprimons tout ce qui se situe au dessus d'un certain niveau hiérarchique et confions la gestion de l'entreprise à ceux qui savent comment il convient de travailler. Si des responsables sont nécessaires, qu'on les élise : un chef n'est chef que s'il est reconnu comme tel.


« Les techniciens ne sont pas des animaux. Si vous vouliez manager des singes, il fallait postuler au zoo de Vincennes. »
L'un des plus incroyables mystères de l'humanité est le suivant : ce n'est pas parce que les choses sont en désordre qu'il faut les organiser, c'est parce qu'elles sont en ordre qu'on peut les réorganiser. On peut ainsi formuler le théorème suivant : une réorganisation est toujours précédée par une période de dysfonctionnement provoquée et entretenue par ceux qui préconisent un changement radical. Cette période de trouble est elle-même précédée par une situation qui, si elle n'est pas optimale, a du moins atteint un point d'équilibre. Pour réorganiser il est donc indispensable de tout saborder au préalable. Pour s'acquitter de cette tâche, rien de plus simple : semer la zizanie dans le personnel en prenant les compétents pour des imbéciles et en gâtant les lèche-bottes.


« Rien ne définit mieux l’être humain que sa disposition à faire des choses absurdes pour obtenir des résultats totalement improbables. »
On ne peut pas reprocher aux penseurs qui pondent les projets de réorganisation de manquer d'imagination. A la DSEM les méninges tournent à plein régime pour fournir des idées novatrices. Or, parfois, le nouveau ressemble à l'ancien mais dit autrement. Ainsi, dans un futur prévu pour très bientôt, il y aura deux sortes de techniciens : les nomades et les sédentaires. Les nomades seront sur la route, armés de leur téléphone Android équipé d'une application de gestion des dé-rangements, et interviendront dans les établissements postaux. Le matériel dont ils pourraient avoir besoin leur sera envoyé directement sur site, comme cela se passe dans d'autres sociétés de maintenance. Les sédentaires resteront à l'atelier et se chargeront de préparer les déploiements, configurer les matériels et gérer certains types d'opérations. C'est là que réside la nouveauté mais c'est là également que rien ne change. En effet, le technicien nomade pourra être sédentaire et le technicien sédentaire pourra être amené à se déplacer. C'est déjà le cas actuellement. Les conditions de travail du technicien, qu'il se déplace ou pas, risquent de se délabrer à l'avenir. Si ce n'est pas franchement nouveau, ça ne va pas dans le sens du bien-être au travail, un sujet qui a été un temps à la mode à la Poste.


« Quelque part entre les hallucinations de la direction et la dure réa-lité du marché, on trouve ce qu'on appelle un business plan. Voici les deux étapes principales qui permettent d'établir un business plan : réunir des informations, ne pas en tenir compte. »
Le Plan de Transformation de la DSEM sur la période 2016-2020 prévoit de clarifier les rôles et responsabilités entre les activités de support et les activités de front office, permettre au Support Client et Téléservice (le SCT, pour les initiés) d’élargir son périmètre d’activité, définir de nouveaux périmètres d’interventions plus homogènes, permettant un meilleur équilibrage de charge, revoir l’organisation des flux et des stocks, poursuivre le développement des compétences et le partage des connaissances, clarifier et adapter les parcours de carrière, combler les départs en cohérence avec l’orientation de la poste d’offrir un avenir pour chaque postier.
(Extrait d'un texte officiel présenté aux techniciens)


« L’entreprise ne peut pas faire grand chose pour stimuler le bonheur et la créativité, mais elle peut faire beaucoup pour les tuer. »
Au niveau local, un Projet d’Établissement prévoit de faire réfléchir les techniciens sur les sujets suivants :
Contenu et sens du travail : comment capitaliser sur les évolutions organisationnelles de la DSEM pour resituer l’action individuelle au cœur des objectifs collectifs.
Vie d’équipe : quelles sont les actions à mener pour recréer un collectif territorial sur un périmètre redéfini.
Compétences et formation : comment miser sur les nouveaux parcours de formations pour développer une dynamique collective d’entraide et de partage des connaissances
Moyens à disposition : comment décliner localement les nouveaux processus opérationnels
Partager et faire des propositions locales permettant de contribuer aux évolutions nationales.


« Les gens normaux croient que si ça marche, c'est qu'il n'y a rien à réparer. Les ingénieurs croient que si ça marche, c'est que ça ne fait pas encore assez de choses. »
Les prochaines semaines risquent d'être mouvementées car le projet ne plaît pas aux syndicats. Beau-coup de techniciens éprouvent de grandes réticences, d'autres sont comme les moutons de Panurge, ils suivront le mouvement sans discuter. Pour le peu que les cadres qui ont pour mission de faire gober le projet au personnel soient suffisamment convaincants, en faisant des promesses qu'ils ne tiendront pas (perspectives d'évolution de carrière, avantages divers ou gratifications substantielles), le projet sera adopté. Il faudra noter que le texte présenté officiellement aux techniciens fait 19 pages alors que le document de travail initial en contient plus de 80. Tout n'a donc pas été dévoilé. Il reste donc quelques sur-prises de dernière minute à découvrir. Je viens de m'apercevoir que je n'aime pas les surprises.


« Pour créer un marché il faut inventer un problème, puis trouver sa solution. »
À une question qui met en évidence le fait que quelque chose ne tourne pas rond, le siège apporte en général une réponse elliptique. Il tourne autour du pot, fait des ronds de jambes, feint de ne pas saisir la problématique et dit qu'il réfléchira quand il en aura le temps. Au mieux, il se fiche de vous, au pire, il vous méprise et ne répond même pas. Je vous rappelle cet axiome trop souvent vérifié : c'est dans les hautes sphères que les choses se décident et c'est en-bas qu'on obéit, et avec docilité, s'il vous plaît !
« Quand il existe une bonne solution et une mauvaise, le siège choisira la mauvaise et vous rendra responsable des conséquences néfastes et de tout échec. »


Au sommaire du prochain numéro :
Vous y trouverez : des informations sur la progression du projet de réorganisation de la DSEM.
Vous n'y trouverez pas : l'horoscope, les prévisions météo, les programmes de la TNT, des modèles de tricot, des analyses politiques, des dissertations sur la nature et le devenir de la dette publique, des sujets qui font polémique actuellement, des critiques sur la politique du gouvernement. Rien que du postal !